Kenza, 11 ans, vit avec son père Ouira et son grand-père Weljo près d’une décharge sur l’île de Curaçao. Le premier, policier, ne croit que ce qu’il voit, tandis que le second tente par tous les moyens de maintenir le lien avec la culture et la spiritualité originelles de l’île et de son peuple. Face à ces deux figures opposées et à l’absence de sa mère, Kenza cherche sa voie.
Second long-métrage du réalisateur néerlandais Eché Janga, Bulado nous invite à suivre Kenza, une enfant sensible et déterminée, qui, au moment de basculer dans l’adolescence, s’interroge sur le monde qui l’entoure. Face à son père, taiseux et rationnel, Kenza a besoin de trouver d’autres voix. Elle se réfugie peu à peu auprès de son grand-père, Weljo, un vieil homme barbu aux allures d’indien qui, installé sur le terrain vague qui entoure la maison de Kenza et de son père, invoque les esprits et se bat contre la menace du rachat de ses terres par les « hommes blancs ». Descendant d’esclaves, ce dernier incarne la tradition au sein de cette petite île au passé colonial encore très prégnant. Éprouvée par l’absence de sa mère, Kenza trouve en son grand-père la figure spirituelle dont elle a besoin. Avec lui, elle réussit à faire une place à sa mère dans son esprit.
Avec une surprenante économie de dialogues, de nombreux plans et motifs à la charge symbolique évocatrice, le film suit avec brio le chemin initiatique de cette jeune enfant, en passe de devenir adolescente. La diversité des paysages et la beauté sauvage de l’île de Curaçao nous renvoie à la violence des sentiments éprouvés par le personnage. Dans un très joli mouvement, le film ramène la mort au centre de la vie. Si dans un premier temps, Kenza et son père ne parviennent pas à nouer un dialogue autour de la mort, en offrant à Weljo une fin juste, ils créent un pont autour de cette grande absence qui jusqu’ici les séparait. Sur un magnifique cheval sombre, la coiffe de ses ancêtres sur la tête, Weljo s’élance vers le plus grand des mystères en symbiose avec la nature et ses croyances. Le film évoque avec beaucoup de grâce et de finesse la spiritualité et la vie après la mort tout en laissant à Kenza et, à travers elle, au spectateur, la liberté de ses croyances.
Lire la suite MasquerAvant Bulado, Eché Janga a réalisé plusieurs court-métrages et publicités ainsi que le long-métrage, Hélium. Douze ans se sont écoulés entre le début de sa rélféxion sur Bulado et la réalisation du film. Eché Janga évoque ici une partie de son histoire personnelle. Là est peut-être la clef de la ténacité qu’a été la sienne pour enfin parvenir à raconter cette histoire.
Tiara Richards, jeune actrice qui incarne le rôle de Kenza, fait dans ce film sa première apparition au cinéma. Le réalisateur l’a repérée dans une école de l’île de Curaçao où le film a été tourné. La jeune fille avait alors déclarée être prête à se lancer dans n'importe quelle aventure tant l'école l'ennuyait.
Lire la suite MasquerCuraçao est une île de 150 000 habitants qui se trouve au nord du Vénézuela et au sud de Cuba, au large des Caraïbes. Bulado y a été entièrement tourné.
La langue que parle les personnages du film s’appelle le Papiamento. C’est un créole (c’est-à-dire une langue tissée à partir de celles des colons et des colonisés). Le créole de Curaçao mélange l’espagnol, le néerlandais, le portugais, le français, l'anglais, des langues africaines et la langue Arawak (une langue amérindienne d’Amérique du Sud et des Antilles).
« Bulado » signifie « volant / s’envolant » en Papiamento, évoquant ainsi ce qui vole, le vent ou encore la robe de la mère de Kenza accrochée au fil à linge.
Lire la suite MasquerÀ partir de 9-10 ans. Le film aborde la perception de la mort par une enfant d’une dizaine d’années. Néanmoins, il ne comporte aucune scène violente ou choquante. Tourné vers la vie, Bulado est un film d’une grande douceur et une très belle manière d’évoquer la disparition d’un être cher.