Kubo et l'armure magique
Rédigée par Marie Horel

Kubo et l'armure magique

De Travis Knight - 1h42 - 2016 (États-Unis)
Kubo et l'armure magique
à partir de 9 Ans

Synopsis

Japon médiéval, XVIIIe siècle. Échappé, lorsqu’il était encore enfant, d’une terrible tempête, Kubo, un jeune garçon sensible et intelligent, vit avec sa mère dans une grotte nichée au bord d’une falaise, près d’un petit village de pêcheurs. Tous les jours, il régale les habitants du village de fantastiques histoires auxquelles il donne vie en faisant virevolter des personnages en origami qui s’animent au son d’un Shamisen, un instrument magique. Ces histoires, ses spectateurs en raffolent, notamment les fidèles Hosato, Hashi et Kameyo. Mais de nombreux mystères entourent le jeune conteur : de quel mal étrange sa mère est-elle habitée, elle qui sombre tous les soirs dans une mystérieuse transe ? D’où Kubo et sa mère, qui mènent une existence marginale, viennent-ils et qui est vraiment, vivant ou mort, le père du garçon ? Poussé par des esprits malfaisants qu’il réveille sans le savoir, c’est sur les traces de ses propres origines et celle de sa famille que Kubo va se lancer…

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Dès la séquence d’ouverture, lorsque les spectateurs découvrent une tempête dont les flots déchaînés ont les traits de La Grande vague de Kanagawa, la célèbre estampe japonaise du peintre Hokusai, ils sont emportés dans l’envoûtant voyage initiatique - animé et en volume - d’un jeune garçon sur fond de mythologie japonaise.

Ce que les jeunes publics vont explorer avec ce film d’animation, c’est donc tout d’abord le Japon médiéval, son décor (temples, palais, villages), ses croyances (esprits, magie) mais aussi ses personnages, notamment les guerriers samouraï, leur courage et leurs attributs (plastron, épée, heaume et armure). Si le film est bien un hommage à la culture japonaise, les images mêmes sont une déclaration d’amour aux maîtres du dessin et du manga, Katsushika Hokusai (appelé, parfois, le père du manga) et Kiyoshi Saito. « Alors que les gamins de mon âge passaient leur temps au foot, moi je rêvais de recréer des armées de samouraïs », confie le réalisateur Travis Knight qui a découvert le Japon à l’âge de 8 ans, lors d’un voyage.

Mais le Japon de Kubo est aussi fantasmagorique car nourri de nombreuses références. Tout d’abord, le monde de Kubo n’est pas un documentaire sur le Japon, il est nourri de l’admiration et des rêves que l’équipe de Laika lui porte et lui voue. L’équipe n’a cependant pas hésité à faire appel à des consultants, notamment le vétéran Sahomi Tachibana, pour rester fidèles à la culture nippone. Aussi, Travis Knight et son équipe s’intéressent à de nombreux univers qui traversent le film : l’univers du conte, Tolkien, les mythologies grecques ou scandinaves, ou encore les mangas. Les scénaristes du film, Marc Haimes et Chris Butler, ont cherché à rendre hommage au conte et à sa dimension mémorielle : « Si Kubo gagne sa vie en tant que conteur de rue, ce n’est pas uniquement pour survivre mais pour garder vivantes les histoires que sa mère lui raconte et qui la tiennent en vie dès qu’elle retrouve un moment de lucidité. » Enfin, la cinéphilie du réalisateur est aussi éclectique, éclectisme que l’on retrouve dans le film : Steven Spielberg, Ridley Scott ou encore David Lean pour le genre aventure et le souffle épique, Georges Lucas pour la fantasy et le voyage dans le temps, Akira Kurosawa pour le Japon ancestral, Hayao Myazaki du côté animation et manga, mais aussi pour les problématiques humanistes. Le Roi Lune, le grand-père de Kubo, celui qu’on ne doit pas réveiller, peut aussi faire penser au fameux personnage de Voldemort, « celui dont on ne doit pas dire le nom » !

Le film Kubo et l’armure magique est aussi une histoire de famille : la mère de Kubo, mais aussi le personnage de Hosato, figure paternelle du film, ont une fonction de guide importante. Le personnage de Kubo cherche à comprendre d’où il vient, qui est son père. Cette histoire d’origines cachées et de malédiction peut aussi ramener le spectateur au mythe antique d’Œdipe. En ce sens, les relations mère/fils renvoient à un dialogue riche entre identité et secret, vie et mort… mais chhuut, n’en disons pas plus !

Si le film est au croisement de nombreuses références, il est porté par une esthétique ambitieuse et un univers graphique superbe. L’admiration pour le Japon des studios Laika se retrouve dans les choix de costumes, de lumière et les figurines. Nelson Lowry, le directeur artistique, a ainsi intégré les composantes des estampes japonaises de la période Edo, l’ukiyo-e, littéralement « le monde flottant » dans la tempête initiale mais aussi le squelette, par exemple. Un soin particulier a été apporté aux costumes, inspirés du Japon impérial et de la période Edo. Les kimonos du film sont, ainsi, des répliques exactes des plus beaux de l’époque... en miniature !

Enfin, la malice et l’humour sont aussi au rendez-vous dans Kubo : la relation entre Madame Singe et Scarabée, compagnons de route de Kubo, ajoute un ingrédient comique à l’aventure. Le couple qu’ils forment renvoie à certains films des années 40 qui réunissent deux personnages qui n’ont rien en commun, mais qui, au fil des aventures, vont apprendre - solidarité oblige ! - à se connaître et à faire équipe dans la quête pleine d'obstacles. L’auteur-compositeur oscarisé Dario Marianelli a cherché à créer une musique-miroir des émotions du personnage principal. Là encore, on retrouve l’admiration pour le Japon puisque la bande-son revêt des tonalités proches d’instruments japonais, le shakuhachi ou le shamisen. Une surprise sonore vous attend aussi à la fin du film !

Pour s’émerveiller de la beauté de l’animation et découvrir une histoire passionnante forte de nombreuses influences, Kubo et l’armure magique est assurément un film d’animation à voir!

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« Nous sommes les héritiers des passeurs d’histoires, les conteurs des temps modernes. Là où les gens se réunissaient autrefois autour d’un feu, dans un amphithéâtre grec ou dans un théâtre de l’époque victorienne, ils perpétuent aujourd’hui cette tradition en allant au cinéma. C’est un privilège incroyable d’offrir ces moments suspendus qui peuvent avoir une influence aussi forte sur la vie des spectateurs. »

Ces mots de Travis Knight montrent à quel point les studios Laika sont tournés vers une animation exigeante nourrie de références littéraires, et vers les publics à qui ils souhaitent offrir un beau voyage animé. À travers une animation de qualité, ce sont aussi des passerelles entre passé et présent, rites antiques, medias et pratiques contemporains populaires que Travis Knight et toute son équipe cherchent à construire.

En dix ans, les studios Laika sont passés du statut de petite société d’animation à l’un des studios de production les plus renommés dans le cinéma d’animation. Un oscar leur est décerné en 2016, récompense qui salue leur contribution importante aux avancées techniques dans le domaine de l’animation en volume, appelée stop motion. Si ce type d’animation est lié à des films du patrimoine cinématographique comme King Kong de Merian C. Cooper ou encore Le Monde perdu de Harry O. Hoyt, les procédés techniques qui lui sont associés restent difficiles à réaliser encore aujourd’hui : le procédé d’impression en relief pour les expressions de visage, ou encore le traitement graphique en numérique en font partie.

« Nos artistes travaillent sans relâche et ne s’arrêtent que lorsqu’ils ont relevé un défi impossible… pour en retrouver un nouveau », lance le directeur des studios. Ce sont ici 400 personnes qui ont travaillé sur le film ! L’animation du squelette géant a ainsi nécessité l’invention d’un système complexe qui permettait de manipuler les bras du géant, tandis que, dans le jardin sous-marin, les yeux bougeaient grâce à un système robotisé. Voici, enfin, quelques chiffres qui font sourire autant qu’ils forcent l’admiration : vous découvrirez la plus petite figurine jamais réalisée en stop-motion, faite en origami, ainsi que la plus grande, un squelette de près de 5 mètres. Kubo a 11007 expressions de bouches et 4429 expressions de sourcils ! Il a fallu 117 parties différentes de visage pour faire bâiller Madame Singe, et 408 pour la scène où Kubo apprend à tirer à l’arc. Pour construire un visage, 1050 feuilles de papier de verre, entre autres matériaux, sont nécessaires…

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Le jeune dessinateur de BD Karim Friha, révélé en 2010 au festival d'Angoulême avec Le Réveil du Zelphire publié chez Gallimard, raconte ici en images sa rencontre avec Kubo et les artistes du studio Laïka. Vous trouverez dans ce journal en images plein d’explications sur la technique du stop motion ! http://www.lemonde.fr/cinema/visuel/2016/09/16/kubo-l-oeil-d-un-dessinateur-sur-les-animateurs_4999045_3476.html#planche01

Le film Kubo, nourri de nombreuses références, vous permettra d’explorer plusieurs univers. Selon les intérêts de votre enfant pour le film, vous pourrez, ainsi, vous diriger vers le Japon. Pour retrouver l’univers des estampes japonaises, cliquez ici : http://expositions.bnf.fr/japonaises/arret/07.htm

L’univers manga renvoie à la filmographie de Miyazaki et aux studios Ghibli : http://www.buta-connection.net/studio/

Allez aussi voir les fiches des films proposées par le site Benshi, qui tournent autour de l'Asie !

Côté lecture, je conseille en premier lieu, et dès 8 ans, en plus des titres fléchés par le site Ricochet, le magnifique livre Le vieux fou de dessin de François Place, chez Folio junior, prix chronos 1999 : dans le Japon du XIXème siècle, un petit vendeur de rues nommé Tojiro fait la rencontre d’un vieil homme fou de dessin, Katsushika Hokusai….  http://www.ricochet-jeunes.org/themes/theme/68-japon

Si c’est l’univers du conte qui attire votre enfant, allez voir sur le site tous les films adaptés de contes et (re)lisez avec vos enfants les contes classiques… et du monde entier !

L’univers de la fantasy et le récit d’aventures sont au cœur de nombreux titres jeunesse :

http://www.ricochet-jeunes.org/themes/theme/231-roman-d-aventure

http://www.babelio.com/liste/1802/Litterature-fantastique-jeunesse

Le film peut aussi être l’occasion d’activités manuelles… Comme Kubo, fabriquez des origami !  Il s’agit d’un art ancestral qui vient de « Ori » qui signifie plier et « Kami » papier. Sa forme la plus populaire est l’Orizuru, la grue. "La légende des mille grues" raconte que si l’on plie mille grues en papier dans l’année, retenues ensemble par un lien, on peut voir son vœu de santé, de longévité, d’amour ou de bonheur exaucé ! http://www.origami-club.com/fr/easy/index.html

Enfin, le savoir-faire artistique de l’équipe du studio Laika et leur imaginaire poétique peut faire penser aux créatures de l’île de Nantes, et à la compagnie Royal de Luxe. « Les Machines de l’île » est un projet de François Delarozière et Pierre Orefice qui se situe à la croisée entre l’imaginaire de Jules Verne et de Léonard de Vinci :

http://www.lesmachines-nantes.fr/

https://www.royal-de-luxe.com/fr/le-mur-d-images/ 

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Les bonnes raisons de voir le film

  • 1 Pour découvrir une animation en volume exigeante, portée par un studio de production à l’éthique tournée vers un dialogue entre culture passée et présente et un message de tolérance
  • 2 Pour découvrir un récit initiatique au croisement de nombreuses références
  • 3 Pour trembler devant les sœurs-sorcières, le squelette géant, les créatures du Jardin des Yeux, le Monstre Lune… Aahhhh !
  • 4 Pour rire des espiègleries de Madame Singe et de Scarabée, les pour le moins étranges mais fidèles acolytes de Kubo dans ses aventures

Pour quel public ?

Parce que le film est peuplé de bêtes fantastiques effrayantes qui pourraient faire peur aux plus jeunes, nous le conseillons à partir de 9 ans.

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