Le Kid
Rédigée par Nadia Meflah

Le Kid

De Charles Chaplin - 1h08 - 1921 (États-Unis)
Le Kid
à partir de 6 Ans

Synopsis

Au sortir de l'hôpital, une fille mère délaissée par son amant et sans ressource, abandonne son bébé dans une voiture. Le véhicule est volé par deux gangsters qui découvrent le bébé et l'abandonnent dans une rue d'un quartier misérable. Charlot le vagabond, qui cette fois dispose d'un petit logement sous les toits, le trouve et, après diverses tentatives infructueuses pour s'en débarrasser, l'emmène chez lui. Cinq ans ont passé. Le bébé est devenu un vrai petit homme. Le vagabond et lui gagnent leur vie ensemble : le Kid casse des vitres avec une balle et Charlot, vitrier, les répare. Mais les services sociaux rodent et veulent enfermer le Kid dans un orphelinat... De son côté, devenue riche, la mère de l'enfant cherche à retrouver son fils.

Rédigée par Nadia Meflah
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Quelle chance de revoir et surtout de faire découvrir ce chef-d'œuvre hautement touchant à tout jeune spectateur ! Portrait d'une enfance en détresse, la beauté du film réside dans sa douceur comme dans sa compassion. L'humour et l'imaginaire sont là comme des boucliers de protection pour tout enfant abandonné, tel est le si beau message d'espoir et de courage que nous offre Charles Chaplin. C'est aussi un formidable film sur la relation d'amour entre un adulte et un jeune enfant adopté.

Mais déjà commençons par le début du film qui, l'air de rien, nous donne énormément d'éléments sur l'époque dans laquelle le récit s'inscrit. En 1919, être une mère célibataire relève d'une tragédie intime et sociale. En effet, les femmes qui se retrouvent seules, enceintes sans être mariées, sont jugées et bannies par la société. La morale et la rigidité des moeurs expliquent en grande partie la détresse de la jeune femme. Dans le quartier pauvre où vit Charlot, où sont les pères ? Remarquez comment les femmes sont le plus souvent seules à élever leurs enfants, et ce dans une grande pauvreté. En cela, Le Kid est un formidable portrait de son époque, où l'égalité sociale n'existe pas, où les enfants travaillent, où la protection de l'enfance est quasi inexistante.

Là où Charles Chaplin nous fait rire avec intelligence, c'est lorsqu'il nous montre combien il est difficile d'adopter un enfant, même tombé du ciel ! Etre père est une responsabilité qui engage toute sa vie, autant bien réfléchir avant de prendre cette voie... Sous le rire, nous devinons le drame de l'enfant abandonné, laissé dans la rue entre les ordures et le caniveau. Lorsqu'il décide de le prendre avec lui, Charlot, comme dans toutes ses activités, déploie une présence et une inventivité délicieuse. Un biberon, une chaise, la toilette, le gouter, un repas de choux, autant de gestes intimes de la vie courante qui deviennent avec lui des moments de grâce et de drôlerie. De même, une simple bagarre entre gamins qui se disputent un jouet devient une épopée de la bravoure, autour de laquelle toute la communauté se rassemble. Et puis il y a ce rêve de paradis où même les chiens ont des ailes... Ne serait-ce que pour cette séquence féérique, Le Kid nous emporte.

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Une origine douloureuse

Lorsqu’il auditionne des bébés pour ce qui deviendra l’un de ses plus grands films, Charles Chaplin vient d’enterrer son premier enfant, décédé le 10 juillet 1919. Seulement dix jours séparent l’enterrement du début de la production du Kid. Chaplin vivait depuis quelques mois une grave crise, à la fois conjugale avec son épouse Mildred Harris, et créatrice. Tout le mois de juin, il fit des bouts d’essai avec 5 jeunes enfants pour un film intitulé Charlie’s Picnic. Sans succès. Il recommence à filmer, même n’importe quoi, obligeant son chauffeur Kono à conduire la voiture, avec à l’intérieur Alf Reeves son producteur. Ça ne fonctionne pas. Chaplin vivait une impasse créative.

Son alter ego, Jackie Coogan

Alors qu'il avait débuté le tournage de son film depuis quelques jours, Charles Chaplin se rendit alors dans un cabaret où se produisait un danseur prodige. À la fin de son numéro, le danseur fit monter sur scène son fils de quatre ans, un ravissant et pétillant petit garçon du nom de Jackie Coogan. Chaplin venait de trouver son acteur principal. Jackie possédait un don inné d'imitateur et pouvait reproduire à la perfection n'importe quelle action ou expression que Chaplin lui enseignait ; ce qui faisait de lui le collaborateur rêvé. Car Chaplin était toujours le seul et unique créateur de ses œuvres. Tous ses collègues s'accordaient à dire que, s'il avait pu le faire, il aurait joué lui-même tous les rôles de tous ses films. À défaut, il recherchait des acteurs et actrices capables d'imiter précisément ce qu'il leur montrait, acceptant fidèlement cette tâche sans poser de questions. Il avait donc trouvé en Jackie Coogan son acteur idéal.

Jackie Coogan, premier enfant star pour un destin hors norme

Jackie Coogan est issu d'une famille d'artistes, comme Charles Chaplin. Lorsque le Kid sort sur les écrans, il a 7 ans et devient immédiatement une star internationale, honoré par les princes, les présidents et le pape en personne au cours de la tournée européenne qu'il entreprend. Il poursuit brièvement une carrière d'enfant acteur mais, comme les fins esprits de Hollywood le soulignent : « il est frappé de sénilité précoce à l'âge de 13 ans. ». Très vite, il se retrouve sans le sou : sa mère et son beau-père ont mal géré ses économies de jeunesse, et le peu d'argent qu'il lui reste est englouti dans des batailles juridiques. La seule issue positive de toute cette affaire est que les ennuis hautement médiatisés de Jackie conduisent à l'adoption d'une loi garantissant une protection financière aux enfants artistes ; encore aujourd'hui, cette loi est connue sous le nom de "loi Coogan". La carrière de Jackie connaîtra un second souffle inattendu quand cet ex-plus bel enfant du monde deviendra cette fois le plus affreux des vieillards en incarnant l'oncle Fester dans la série télévisée La Famille Addams (1964).

Un cinéaste trop méticuleux pour des producteurs impatients

Charles Chaplin se met au travail avec sa très jeune recrue, Jackie Coogan, le 30 juillet 1919 sur son film intitulé The Waif (l’enfant abandonné) qui deviendra ensuite The Kid. Lorsqu’il démarre le tournage de son soixante-huitième film, Chaplin est alors sous contrat (élaboré par son frère Sydney) depuis 2 ans avec la First National, qui lui garantissait une liberté quasi totale. De plus, il tournait dans son propre studio qu’il avait fait construire en trois mois en 1917, à l’angle de Sunset Boulevard et de l’avenue La Brea. Ce studio au style cottage anglo-saxon comprenait des plateaux à ciel ouvert. Chaplin, comme d’habitude, filme dans la continuité. Alors que la First National s’impatiente, Chaplin a la bonne idée d’exploiter les rushes de Charlie’s Picnic pour tourner en 7 jours Une Journée de plaisir, réjouissante satire du loisir bourgeois.

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Des livres pour les enfants :

Charlie Charlot de Michelle Humbert et Nathalie Novi (éditions Desclée de Brouwer, janvier 2003) est un beau livre pour enfant. On y retrouve son génie, son époque et ses souvenirs d’enfant. A cinq ans, Charlie entre en courant dans le cercle de lumière : c’est pour voler au secours de maman. Avec amour et respect, Nathalie Novi lui prête aujourd’hui ses merveilleuses couleurs. Pour tous ceux qui aiment rire et pleurer au cinéma.

Petit Charlot deviendra Charlie de Bernard Chambaz avec des illustrations de Pef (Editions Rue du Monde, 2011) raconte l'enfance de Charles Chaplin. Le petit Charlie a la vie rude dans les rues de Londres. A huit ans, il travaille déjà. Souvent, même, il doit mendier. La lumière, il la trouve sur les planches. Claquettes, mime, puis cinéma. Il est doué. Le monde entier acclame son talent, dans son costume de Charlot. Mais jamais Charlie Chaplin n'oubliera l'enfant pauvre qu'il était.

Le Kid est inscrit au catalogue du dispositif national Ecole & Cinéma. Retrouvez la fiche "en famille" sur la plateforme Nanouk.

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Les bonnes raisons de voir le film

  • 1 La plus belle histoire d'amour entre un père et un fils
  • 2 La bouille adorable du jeune acteur talentueux Jackie Coogan
  • 3 Le plaisir des larmes comme de la joie

Pour quel public ?

Film d'une grande sensibilité, attachant et bouleversant, il peut tout à la fois faire pleurer et rire. C'est un film à voir en famille à partir de 6/7 ans.

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