Monnaie de singe
Sur le pont d’un paquebot, le capitaine prend l’air. Arrive son second :
- Capitaine, capitaine ! Il y a quatre passagers clandestins dans la cale !
- Quatre ! Comment savez-vous qu’ils sont quatre ?
- Ils chantent en canon !
Le capitaine lit le billet transmis par le second : « Et le capitaine de ce rafiot est un bon à rien ». Non seulement les quatre ont le toupet de s’embarquer clandestinement à bord de son paquebot, mais en plus ils se paient sa tête ! Dans la cale, quatre tonneaux de hareng saur alignés : les quatre frères Marx chantent à tue-tête (et en canon) Sweet Adeline. Typique d’une scène d’exposition marxienne : cela donne le ton. Tout va à toute vitesse ! Du tac-au-tac ! Des courses poursuites, quiproquos, gags délirants, situations absurdes, du comique à l’état brut ! Et ce, tout au long du film !
Les frères Marx (qui sont vraiment frères) appartiennent à la famille des burlesques. Pauvres, américains, formés au music-hall, comme Chaplin et Keaton. 20 ans de tournée dans les bas-fonds des théâtres des États-Unis, avant d’exploser à Broadway, à la fin des années 20. Ils s’emparent du cinéma, au moment où il devient parlant ; ça tombe bien ils sont très bavards, très bruyants, et en plus ils chantent et jouent de la musique ! Seul Harpo fait le lien avec le cinéma muet, puisqu’il joue sans parole. Clown enfantin, il ne s’exprime qu’avec son corps et son visage, dont l’expressivité est portée à son comble, lorsqu’il fait sa grimace favorite, le « gookie ». Harpo délivre donc ses messages sous forme de rébus en gestes et, la plupart du temps, c’est Chico qui les déchiffre. La principale caractéristique des Marx Brothers est leur férocité. Leur esprit subversif s’attaque à tous les fondements de la société des hommes. Ce sont des escrocs, des parasites, des clandestins, qui ne cherchent qu'à manger (voire s'empiffrer) gratos et soutirer de l'argent aux victimes qu'ils se choisissent, de préférence dans le grand monde. Avec Monkey Business, leur troisième long métrage, les Marx affirment leur style absolument désopilant. Ils sont en pleine maturité, débordant d'énergie et d'inventivité. Ils ne se soucient pas du scénario, et préfèrent enchaîner les gags, les situations délirantes et les numéros chantés ou dansés.
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Dans la famille Marx, il y a Groucho, gros sourcils, grosse moustache, en costume queue de pie, qui fume sempiternellement un gros cigare ; Chico, à l’accent italien, il porte un costume de velours élimé et un chapeau mou, il joue du piano ; Harpo, perruque blond-roux, frisée, porte un vieux trench-coat, joue de la harpe, il est muet ; Zeppo, blanc-bec séducteur, s’allie avec ses frères pour escroquer les pigeons.
Après cinq films réalisés pour la Paramount, les Marx feront leur entrée à la MGM, le studio prestigieux des comédies musicales, ayant des moyens beaucoup plus importants. C'est à ce moment-là que Zeppo abandonne le quatuor et que les frères Marx deviennent un trio. Sous la direction du jeune Irving Thalberg, au moins pour Une Nuit à l'opéra, les intrigues de leurs films deviendront beaucoup plus élaborées. Ils disposeront notamment des moyens exceptionnels pour tester systématiquement l'efficacité de leurs gags en public. Ils en perdront par la suite le côté totalement chaotique et décousu de leurs créations, qui faisait leur fantaisie inégalable.
Tous les films des Marx sont bons à voir. Notamment Plumes de cheval, La Soupe au canard, Une Nuit à l'Opéra.
Une mini biographie des Marx, spécialement écrite pour les enfants de 8/12 ans, aux éditions A dos d'âne :
http://www.adosdane.com/fr_FR/ouvrage/Des%20graines%20et%20des%20guides/41/Les%20Marx%20Brothers,%20les%20indomptables%20du%20cin%C3%A9ma/Mathieu%20De%20Muizon,%20H%C3%A9l%C3%A8ne%20Deschamps
À partir de 8 ans pour lire sans trop de difficulté les sous-titres, denses, nombreux et pleins de jeux de mots. Cependant, le personnage de Harpo restera le favori des enfants, et permettra à coup sûr d'en oublier la lecture.
