Dans ce film remarquable de sensibilité et de beauté, le cinéaste irlandais, Colm Bairéad suit le temps d’un été le parcours de la jeune Caít interprétée par Catherine Clinch qui fait là ses premiers pas au cinéma. 

On découvre d’abord la jeune enfant dans l’atmosphère sombre et poisseuse de son foyer. Son père distant avec ses enfants, infidèle à sa femme et porté sur la boisson ne lui prête guère attention. Sa mère, enceinte d’une sixième ou septième enfant est éprouvée par son état, sa relation conjugale et des difficultés financières. Sans amour, rejetée par ses aînées, Caít se réfugie dans le silence. Lorsqu’elle arrive chez des cousins de sa mère pour y passer l’été, Eibhlin et Sean, un couple d’une soixantaine d’années, de nouvelles perspectives s’ouvrent à elle. Deux cœurs d’abord. Celui d’Eibhlin, pétri de tendresse et d’affection, toute dévouée à cette enfant dont on ne s’est jamais occupé. Puis, plus retorse, celui de Sean, un homme bon et doux qui connaît la valeur du silence. 

Caít (Catherine Flinch), tant personnage que comédienne, est saisissante par son silence et son immobilité. Habituée à se faire toute petite, elle peine à prendre la place et la parole qu’on est prêt à lui accorder au sein de son foyer estival. Mais peu à peu, les langues se délient, les expressions se détendent et on découvre une jeune enfant avide de vie : de faire, de comprendre, de découvrir. La relation qu’elle tisse avec ses « parents d’adoption » nous touche alors en plein cœur. De nombreux indices laissent néanmoins penser qu’un drame a eu lieu dans cette maison. Bien qu’Eibhlin prétende qu’elle ne cache aucun secret, aucune honte, ses murs en portent un de taille. C’est ce douloureux secret que la jeune fille va découvrir au contact de ses hôtes tout en délicatesse. 

Adaptée d’une nouvelle de la célèbre autrice irlandaise, Claire Keegan, Les Trois Lumières (celles que l’on voit de l’autre côté du rivage lorsque Sean et Caít se retrouvent sur la plage après le dévoilement du secret), le film est d’abord un chef-d'œuvre par son écriture. Les dialogues de l’enfant sont d’une justesse étonnante et l’interprétation de la jeune comédienne troublante de vérité. Le réalisateur a fait le choix de ne pas quitter son héroïne et le monde nous est ainsi découvert par ses yeux. L’attention portée aux lumières, au souffle du vent dans les feuilles, à la vibration de l’air sur l’eau, aux couleurs se confondent avec le regard de cette enfant curieuse qui se cache sous son apparence figée et glacée. La caméra tantôt fixe, tantôt glissante, est un magnifique vecteur d’émotion dans ce premier long métrage qui en appelle d’autres. L’attention portée au décor, l'attrait pour les gros plans qui permettent de goûter pleinement les expériences sensibles du personnage sont un délice pour le spectateur. 

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